Topiramate et risques chez les enfants exposés pendant la grossesse : modification des conditions de prescription et de délivrance aux femmes concernées
06/10/2022
Afin de limiter l’exposition pendant la grossesse, en raison des risques de troubles neurodéveloppementaux pour l’enfant à naître récemment mis en évidence, en sus des risques malformatifs déjà connus, l'ANSM modifie les conditions de prescription et de délivrance (CPD) des médicaments à base de topiramate pour les filles, adolescentes, femmes en âge de procréer et femme enceintes : à compter du 2 novembre 2022, pour les initiations de traitement par topiramate et à compter du 2 mai 2023 pour les patientes en cours de traitement par topiramate.
L'ANSM rappelle que chez les femmes enceintes ou les femmes en âge d’avoir des enfants et qui ne disposent pas d’une méthode de contraception efficace, le topiramate :
- est contre-indiqué dans le traitement de la migraine
- est contre-indiqué dans le traitement de l’épilepsie sauf en cas de nécessité absolue (inefficacité des autres traitements ou intolérance aux autres traitements).
La prescription initiale annuelle sera prochainement réservée aux neurologues et pédiatres. Elle devra s’accompagner du recueil de l’accord de soins de la patiente (ou de son représentant légal) par ces médecins après information complète de la patiente.
Jusqu’au 2 mai 2023, les renouvellements pourront être réalisés par tout médecin.
La dispensation sera conditionnée à la présentation du formulaire annuel d’accord de soins cosigné par la patiente et le médecin spécialiste (neurologue ou pédiatre) et de l’ordonnance annuelle du neurologue ou du pédiatre.
En parallèle, et à la demande de l'ANSM, l’ensemble des données disponibles sont réexaminées au niveau européen afin de réévaluer la balance bénéfice/risque de ces médicaments chez les patientes.
Un courrier sera adressé prochainement aux professionnels de santé pour les informer des risques et de l’évolution des CPD.
Information pour les pharmaciens
- Pour toute dispensation du médicament, la présentation de la prescription initiale annuelle du spécialiste en neurologie ou en pédiatrie ainsi que du formulaire annuel d’accord de soins cosigné, est obligatoire :
- À compter du 2 novembre 2022 pour les initiations de traitement ;
- À compter du 2 mai 2023 pour les patientes en cours de traitement.
- Si vous avez des patientes déjà traitées par topiramate, informez-les de la nécessité de prendre rendez-vous avec un neurologue ou un pédiatre et avant le 2 mai 2023 pour que leur traitement puisse être renouvelé ;
- À chaque dispensation :
- Sensibilisez la patiente aux risques liés à l’exposition au topiramate pendant la grossesse ;
- Rappelez-lui la nécessité d’utiliser une contraception sans interruption pendant toute la durée du traitement ;
- Si vous avez connaissance d’un projet de grossesse (discussion ou achat de tests d’ovulation par exemple), invitez-la à consulter son médecin ;
- En cas de survenue d’une grossesse, invitez-la à consulter en urgence le médecin spécialiste et, si elle est traitée pour une épilepsie, à ne pas interrompre son traitement avant d’avoir échangé avec lui ;
- Une fiche d’aide à la dispensation est mise à votre disposition, elle vous donne toutes les étapes clés à suivre lors de la dispensation de ces médicaments.
- Une lettre d’information vous sera prochainement adressée pour vous rappeler l’ensemble de ces mesures et les échéances.
Information pour les médecins
- La prescription initiale annuelle sera réservée aux spécialistes en neurologie ou en pédiatrie à compter du 2 novembre 2022. Vous n’êtes ni neurologue, ni pédiatre et vous avez des patientes soignées par topiramate ? Orientez-les vers un de ces spécialistes afin qu’il puisse établir la prescription initiale annuelle ;
- Jusqu’au 2 mai 2023 le renouvellement des prescriptions est possible par tout médecin ;
- Un formulaire d’accord de soins devra être cosigné annuellement par la patiente (ou son représentant légal) et le médecin spécialiste prescripteur neurologue ou pédiatre, après information complète de la patiente ;
- Une lettre d’information vous sera adressée dans les prochains jours. Elle vous précisera l’ensemble des modifications et les échéances.
Information pour les patientes
> Début du traitement
- À compter du 2 novembre 2022, un médicament à base de topiramate ne pourra vous être prescrit la première fois que par un neurologue ou un pédiatre ;
-
Lors de cette première prescription, vous devrez signer avec votre médecin spécialiste un formulaire d’accord de soins
qui atteste notamment que vous avez été informée des risques pour l’enfant à naitre en cas d’exposition pendant la grossesse et de la nécessité d’une contraception efficace.
Pour les patientes mineures, cet accord de soins sera signé par les parents.
> Renouvellement de la prescription
- Si vous, ou votre enfant, êtes déjà traitée avec un médicament contenant du topiramate, vous devez prendre rendez-vous dès que possible et avant le 2 mai 2023 avec un neurologue ou un pédiatre afin qu’il puisse le cas échéant renouveler la prescription et signer avec vous l’accord de soins ;
- A partir du 2 mai 2023, vous devrez consulter votre neurologue ou le pédiatre de votre enfant, au moins une fois par an pour réévaluer la nécessité de poursuivre ou non le traitement, notamment au regard d’un projet de grossesse. Lors de cette consultation, vous devrez à nouveau signer le formulaire annuel d’accord de soins. Dans l’intervalle, votre médecin généraliste pourra renouveler la prescription.
> Délivrance du traitement en pharmacie
Pour obtenir votre médicament ou celui de votre enfant, vous devrez présenter la prescription annuelle du neurologue ou du pédiatre, ainsi que le formulaire annuel d’accord de soins cosigné :
- à partir du 2 novembre 2022 pour les initiations de traitement
- et à partir du 2 mai 2023 si vous êtes déjà traitée par un médicament contenant du topiramate.
Il est important que vous compreniez bien les risques liés à l’exposition à ces médicaments pendant la grossesse et les mesures de précaution qui en découlent, n’hésitez pas à interroger les professionnels de santé qui vous suivent :
- Vous devrez utiliser une méthode de contraception efficace pendant toute la durée du traitement ;
- En cas de projet de grossesse, n’arrêtez pas votre contraception avant d’avoir pu échanger avec votre médecin. Il adaptera votre prise en charge à votre projet ;
- En cas de survenue d’une grossesse, n’arrêtez pas votre traitement sans avoir échangé avec votre médecin.
Une réévaluation européenne à la demande de l’ANSM
Depuis juin dernier, à notre demande et suite à la publication de l’étude qui mettait en évidence un risque de troubles neurodéveloppementaux chez les enfants après exposition au topiramate au cours de la grossesse, un examen de l’ensemble des données disponibles est en cours au niveau européen. Cet examen permettra de réévaluer la balance bénéfice/risque du topiramate chez les patientes, pour toutes les indications.
Dans ce cadre, l'évaluation des données sur les risques de troubles neurodéveloppementaux va se poursuivre pendant les prochains mois. À l'issue de la procédure, les AMM des spécialités à base de topiramate pourraient être modifiées et des mesures additionnelles de réduction du risque pourraient être mises en place.
Rappel sur les risques pour les enfants exposés au topiramate pendant la grossesse
Les enfants exposés au topiramate pendant la grossesse encourent les risques suivants :
- Malformations majeures, dont le risque est environ trois fois supérieur au groupe de référence (*) ne prenant pas de médicament anti-épileptique. Ces malformations incluent des fentes des lèvres et du palais (fentes labiales et palatines), des atteintes des organes génitaux (hypospadias) et une diminution de la taille de la tête et du cerveau (microcéphalies). Selon les dernières études, le risque observé de malformations majeures s’élève jusqu’à 8,2%.
- Risque augmenté de petit poids à la naissance du nouveau-né ;
- Risque de troubles neurodéveloppementaux mis en évidence récemment dans une étude scandinave (**). L’extrapolation des résultats de cette étude à la population française permet d’estimer :
- un risque de survenue de troubles du spectre autistique qui se situe entre 2 et 6 % (***).
- un risque de survenue d’une déficience intellectuelle qui situe entre 1 et 8 % (***).
(*) Dans la population générale européenne, le risque de malformations majeures est de 2 à 3 %
(**) étude sur la population scandinave publiée en mai 2022 dans le JAMA Neurol.). Dans la population générale en France, le risque de trouble autistique est de 0,8 à 1,0 % et le risque de déficience intellectuelle est de 1 à 2 %.
(***) Ces valeurs doivent être considérées avec prudence compte tenu des limites de l’extrapolation de ces résultats scandinaves aux données françaises.