L'origine de l'Ordre
L’idée de créer un ordre régulant l’exercice de la profession de pharmacien est née sous la IIIème République. Elle résulte du constat d’insuffisance de la législation du 21 Germinal An IX (11 avril 1803) qui a régi l’exercice de la pharmacie tout au long au XIXème siècle et jusqu’à la Seconde guerre mondiale. Progressivement, puis de manière accélérée au début des années 1920, l’évolution rapide des structures commerciales a révélé une série de dysfonctionnements dans le secteur des médicaments et autres produits destinés à la santé qui portait de plus en plus préjudice au public.
Multiplication anarchique du nombre des officines, insuffisante vérification des capacités à exercer, usage de prête-noms, colportage de plantes médicinales sans titre, libertés excessives dans la réalisation des préparations médicamenteuses ou encore « guerre des rabais » sur le prix des spécialités se multipliaient sans que les autorités publiques parviennent véritablement à y faire face. Devant ces abus croissants, à visée purement commerciale, pratiqués par certains exploitants de pharmacies, l’Association générale des syndicats pharmaceutiques de France (AGSPF), créée à la fin du XIXème siècle, après avoir tenté en vain d’introduire une réglementation professionnelle, réclama vigoureusement un ordre professionnel capable d’assurer une régulation déontologique..
Le projet de l’AGSPF s’inspirait à la fois de l’Ordre des avocats (qui régulait l’exercice de ces derniers, sans interruption, depuis 1810), et d’une institution analogue qui fonctionnait depuis 1897 pour les pharmaciens des départements devenus « allemands » d’Alsace-Moselle. Une proposition de loi, déposée au cours de la législature 1928-1932 en ce sens, fut adoptée par la Chambre des députés et transmise au Sénat.
En 1939, les pharmaciens, consultés par référendum, confirmaient à une majorité de 80 % leur souhait de voir créer cet Ordre. La proposition était prête à être votée, lorsque le déclenchement de la guerre suspendit son adoption.
Après le 10 juillet 1940, le régime de Vichy écarta la création de l’ordre attendu par la profession de pharmacien. Il opta pour une organisation bien différente conforme à sa doctrine corporatiste : des chambres départementales et des conseils régionaux de pharmaciens, coordonnés par un Conseil supérieur de la pharmacie, étaient chargés de défendre les intérêts matériels des pharmaciens, donc censés remplacer les syndicats qui avaient été interdits. Ils recevaient en outre la mission d’exercer des actions disciplinaires à l’égard des professionnels. Leurs membres n’étaient pas soumis à élections démocratiques, mais désignés par les autorités administratives.
À la Libération, une ordonnance du Gouvernement provisoire de la République française en date du 5 mai 1945 supprima l’organisation professionnelle dénuée de légitimité démocratique et détournée de la seule vocation qui aurait dû être la sienne : la défense de la santé publique et des patients, à travers les principes de compétence et de bon exercice. C’est cette même ordonnance du 5 mai 1945 qui créa l’Ordre national des pharmaciens renouant ainsi avec le projet présenté avant-guerre.